Les valeurs africaines n’existent pas



Ne faites pas les offusqués, au fond vous savez que c’est vrai.

Lors d’une discussion que j’ai  récemment eu avec un ami sur cette question de valeurs africaines, je me suis rendu compte d’un fait tout à fait alarmant: ces valeurs avec lesquelles on nous bassinent jour et nuit sont en fait dans l’imaginaire collectif, elles n’existent pas réellement.

J’ai donc décidé de mener une petite étude sociologique en posant la question sur whatsapp, dans des conversations. Je voulais avoir l’avis des gens sur la consistance de ce terme “valeurs africaines”. En gros, quelles sont ces valeurs là? 

La solidarité, le partage, la fraternité, le respect des aînés, le sens de la famille etc… m’ont-ils répondus pour la plupart . Sans oublier le mythe contemporain de la #vraiefemmeafricaine (merci grande sœur Bintou Traoré Mariam) et son infinie soumission.

Je suis restée interloquée après ma petite étude  et je me suis rendu compte que quand les gens pensent “valeurs africaines” ils pensent totalement autre chose que ce à quoi ils disent penser . Oui, de cette étude il est ressorti quelque chose de vraiment profond dont le dénouement est venu d’une discussion avec mon amie Marie Philippe. Mais, allons pas à pas; laissez moi déjà vous démontrer que les valeurs africaines n’existent pas.


1- Des valeurs africaines, vraiment ?


Dans le listing des valeurs que l’on qualifie d’africaines il est ressorti un certain nombre de valeurs (bien entendu) mais qui ne sont pas typiquement africaines.


Vous avez dit solidarité ?


La solidarité peut être définie comme un “Rapport existant entre des personnes qui, ayant une communauté d'intérêts, sont liées les unes aux autres”. 

En clair, pour qu’il y ait solidarité, il faut que nous soyons mutuellement liés par un intérêt. Dans la solidarité, c’est l’intérêt général qui prime, c’est le bien-être des autres qui est mis en avant.

Il est certain que cette valeur est présente en Afrique. On assiste tous les jours à des élans de solidarité pour des personnes malades, des personnes défavorisées et j’en passe. Cependant, ce n’est pas une valeur dont l’Afrique est la seule gardienne faisant d’elle une “valeur africaine” et puis c’est tout. 

Les 15 et 16 avril 2019, la mythique cathédrale Notre Dame de Paris s’est vue ravagée par les flammes. S’en est suivi un immense élan de solidarité au sein de la communauté française. Entre cagnotte mise sur pieds pour collecter des fonds, confiseries à l’effigie de la cathédrale vendue pour que les fonds servent à sa reconstruction, on a pu voir que la solidarité s’étend au delà de notre cher continent.


Autre exemple, du 25 au 31 août 2005, une partie des USA est violemment frappée par le puissant ouragan Katrina. On dénombre même un millier de morts et de nombreuses familles ayant absolument tout perdu après son passage.

Là encore, c’est une immense chaîne de solidarité qui s’est créée. Création de logement de fortune pour les familles ayant perdu leurs maisons; récolte de fonds pour aider les sinistrés et bien d’autres actions ont été mises sur pieds de façon SOLIDAIRE.


Et , des exemples comme ça sont légions et démontre que , si la solidarité est une valeur importante, elle n’est en rien l’apanage de l’Afrique qui d’ailleurs tend de plus en plus à la perdre.


Quid de la sacro-sainte valeur de la famille?


Selon le Larousse, la famille est un Ensemble des personnes unies par un lien de parenté ou d'alliance. 

Ainsi défini, on se bornerait à croire que les liens de parentés suffisent à créer une famille. C’est d’ailleurs sur ce détail que se construit la dite valeur africaine de la famille.

En Afrique, la famille ça compte. En Afrique, avoir des liens même très lointains avec quelqu’un fait de lui ton “parent”; en Afrique il n’y a pas de cousin.es il n’y a que des frères et sœurs. 

Ceci est beau , très beau parce que ça témoigne d’une réelle volonté d’appartenance. Le rapport à la famille est tellement fort qu’un individu sans est un peu “bizarre”.

Mais, n’existent-il pas ce sentiment partout dans le monde? 


En Inde, la famille est tellement importante que personne ne déménage jamais. Une fois à l’âge adulte,même mariés , tout le monde reste vivre dans la maison familiale si bien qu’on se retrouve avec 3,4 générations de femmes et d’hommes sous le même toit. C’est la même chose en Russie.

Ceci pour dire que , certes la famille tient une grande place sur notre continent mais c’est un peu le cas partout ailleurs. Peut-être qu’en France on appelle pas ses cousin.es frères et sœurs mais le lien est là.

Aux USA on ne vit pas tous ensemble mais on fait des mains et des pieds pour passer thanksgivings et noël ensemble; en famille.


D’ailleurs, en 2023, se borner à croire que la famille c’est seulement le lien de parenté se serait se leurrer. Comme disait mon amie Marie Philippe ( que j’ai beaucoup questionné pour écrire cet article) , des étrangers se comportent parfois plus comme ta famille que ceux avec qui tu es sensé avoir un lien de parenté. 

Oui, en ce 21e siècle, en plus d’être une valeur commune au monde entier, la famille revêt davantage un aspect social puisqu’on peut désormais choisir qui en fait partie indépendamment de la parenté.


Une deconstruction totale de ce qu’on dit être valeurs africaines pourrait être faites pour chacune d’elles avec preuve à l’appui mais au finale le résultat serait le même. Ces valeurs sont humaines, universelles, intrinsèques à toute personne, à toute communauté. Rien de typiquement africain.

Alors, si ces valeurs sont universelles, quelles sont nos valeurs à nous ?


2- Mais alors, quelles sont les « vraies » valeurs africaines?


Je vous ai dis au départ qu’un fait alarmant était ressortie de mon étude sociologique et cela se résume en cette belle phrase dite par Marie Philippe m’a dite : “ce qui est typiquement africain, c’est la souffrance de la femme”. 

Et c’est là que prends tout le sens du mythe très patriarcale de la #vraifemmeafricaine qui serait soumise à se damner, qui accepterait les brimades et infidélités de son conjoint dans le but de protéger son “foyer”, qui s’habillerait “décemment”, qui serait “pudique” et ne parlerait jamais plus fort que son mari et autres couardises du genre.

Oui, vous pourrez après dire tout ce que vous voulez sur le féminisme et  féministe qui écrit ces lignes, vous ne pourrez pas nier que ce que la plupart appellent valeurs africaines n’a en fait que pour but de continuer à opprimer les femmes. 

Dans son argumentaire , Marie Philippe a continué en me disant qu’en “24 ans d'existence, je n'ai jamais vu un homme noir, ou africain, se faire remonter les bretelles au motif qu'il n'avait pas de respect pour les valeurs africaines. Ça a toujours été la fillette, la jeune fille, la femme, la mère. À tous les stades de son évolution, ces valeurs lui ont été imposées. Et plutôt durement.”.

En la lisant je n’ai pu me résoudre à faire l’autruche et à nier l’évidence.

Quand tu es une petite fille en Afrique, tu es celle qui doit nettoyer après ton frère, qui doit assister ta mère à la cuisine etc. Dès le bas âge, tu est enfermée dans des rôles de genre. Et, en 2023, il y’a encore quelques personnes qui estiment qu’il est plus important d’envoyer les garçons à l’école parce que toi la fille tu dois te préparer à tenir un foyer. Et puis de toute façon, les hommes ont plus de capacité intellectuelle que toi bonne femme 

Alors tu grandis en étant enfermée dans une petite case.

A l’adolescence, déjà chargée du lourd fardeau de ton enfance inégalitaire, tu es confrontée aux premiers élans de sexisme.

“Une jeune fille ne s’habille pas comme ça” te disent-ils quand ils estiment que tu commences à trop vivre ta féminité. « Une jeune fille ne parle pas comme ça » te disent-ils encore quand tu commences à démontrer de certaines attitude de leader. Il faut vite étouffer en  toi toutes velléités de revendication sinon tu pourrais être de la race de ces femmes impies qui dominent leurs hommes. Quel drame! 

Pire, on essai d’avoir le contrôle de ta libido en t’excisant sous prétexte que ça t’évitera de “vagabonder sexuellement” ou en te donnant des injonctions qu’un être humain masculin du même âge que toi ne reçoit pas sous prétexte que ton corps a toi est sacré.

On commence ainsi à insérer en toi les bases du mythe de la femme « épousable ». 

Une fois adulte, rien ne change. On oppose maintenant ta respectabilité à ta vie matrimoniale. Il est mieux pour toi de faire un mauvais mariage que de ne pas en faire du tout parce que les femmes sans maris sont des femmes de petite vertu disent-ils.

Tout ça au nom de quoi? Des valeurs africaines. 


Il est vrai que le sexisme, la misogynie existe partout sur ce globe. La différence est qu’ailleurs, on ne se base pas sur des sois disantes valeurs pour la pratiquer. Faites la remarque vous-même, on ne parle de #vraiefemmeafricaine qu’en comparaison à la femme occidentale qui ne serait pas soumise, qui n’accepterait pas que sa place soit à la cuisine et qui n’en a cure du mariage corolaire de la respectabilité.


Alors Oui, que vous le vouliez ou non, ce que vous décrivez pour la plupart  comme valeurs africaines pour masquer le fond de vos pensées sexistes n’existent pas. Une seule réalité étant que la seule valeur vraiment africaine que vous défendez c’est l’oppression et le rabaissement de la femme…

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